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Et si on écrivait un morceau ?

lundi 23 mars 2009, par Valentin.

Bonjour tout le monde ;

Mes élèves ne l’ignorent pas, je suis un acharné de la récup’ pédagogique ; toutes les situations, toutes les rencontres me fournissent des prétextes pour fourguer ma salade. Quelle salade au juste ? Disons que je me sens concerné par l’avenir de la musique, de la création et de la culture « savante » en général. À une époque où l’on est constamment exposé à des produits industriels de consommation immédiate (ce qui est très bien) qui se font passer pour « LA » culture (ce qui est plus ennuyeux), je suis frappé de voir, par exemple, que pour mes élèves un compositeur c’est un bonhomme en perruque qui vivait il y a trois cent ans et dont tout le monde se contrefout.

 Une commande peu banale

C’est pour cela que j’ai été ravi, il y a quelque temps, de recevoir un petit mail d’un groupe de lycéens que j’ai rencontré à Montpellier, et qui a assisté à une représentation de mon opéra.

Nous avons beaucoup réfléchit tous les 4 au sujet d’une oeuvre que nous souhaitons te commander.

Nous sommes un ensemble très lié constitué d’une tromboniste, un violoncelliste, une harpiste et un percussionniste. Nous pensons que la variété de ces instruments peut te permettre de créer des combinaisons d’ambiances et de couleurs peu communes et exceptionnelles.

Nous souhaiterions avoir ton avis sur ce projet sachant que nous sommes très motivés.

(Eh... Quand même...

... on peut dire qu’ils savent la vendre, leur salade, hein ? :) )

Je leur ai dit la même chose qu’à mes élèves : « OK je marche, mais nous allons faire ça ensemble, pour que vous soyez de plus en plus autonomes vis-à-vis de moi ».

J’ouvre donc ce billet pour que nous puissions réfléchir et discuter ci-dessous de l’élaboration de ce projet, tous ensemble et publiquement.

 Le casse-tête commence

Je vous présente donc :

  • Camille, qui fait de la harpe
  • Cécilia, qui joue du trombone
  • Raphaël, qui fait du violoncelle
  • Clément, qui tape sur des percussions.

Voyez-vous venir le casse-tête ? Moi, oui.

On a d’abord un déséquilibre dans les intensités : de tous les instruments d’un orchestre, le trombone est le plus puissant et la harpe un des moins puissants. Les percussions peuvent aller très fort (mais tous les percussionnistes ne sont pas des brutes quand même, hein Clément ?) ; quant au violoncelle, cela dépend de son écriture.

Ensuite, un déséquilibre de tessitures : le trombone et le violoncelle sont des instruments plutôt graves, et les aigus de la harpe ne sont pas assez puissants pour passer par-dessus.

Enfin, des écritures instrumentales très différentes. Le trombone est un instrument monodique ; la harpe est un instrument harmonique, le violoncelle peut faire un peu des deux (mais surtout de la monodie), et les percussions... euh, bin vous m’avez compris.

Un atout du violoncelle est qu’il peut donner des notes très aigües, qui sont à la fois expressives et puissantes. Par contre, cela demande un très bon instrumentiste. Raphaël ?

La harpe peut avoir un langage très rythmique, que ce soit par des accords ou en tapant sur la table d’harmonie (comme le font les guitaristes de fandango). Ce qui pourrait, éventuellement nous servir de contrepoint aux percussions.

Le percussionniste, dans l’idéal, pourrait trouver un instrument qui fasse des notes : timbales, xylophone, vibraphone ou marimba. Clément, tu aurais ça quelque part ?

Le trombone, enfin... bin, le trombone, il fait ce qu’il a à faire et il essaye de jouer juste.

(Je dis bien, il essaye :) )

Bref, le but va être de différencier les instruments le plus possible pour qu’on les entende bien tous les quatre : par exemple, si je fais jouer une même phrase à l’unisson au violoncelle et au trombone, ce n’est même pas la peine que le violoncelle joue car on ne l’entendra pas.

 Parlons de la forme

Bon, dans l’immédiat on va essayer de se poser la question de la forme de la pièce. Durée (à peu près), tempo, caractère ?

Je laisse cette question en suspens, d’autant qu’elle dépend des instrumentistes eux-même. Si on fait un chant élégiaque très lent, c’est sympa pour la harpiste, ça l’est moins pour le percu qui va s’ennuyer ferme, et quant au tromboniste il va s’asphyxier dès la deuxième mesure. Par exemple.

 Et puis, tant qu’on y est dans la récup’...

Je vais juste en profiter pour citer quelques morceaux qui me viennent à l’esprit pour que tous les lecteurs qui voudraient suivre la discussion se mettent bien dans l’oreille le son des instruments en question.

Harpe : écoutez donc le dernier mouvement de la Sonate de Debussy, la harpe y joue un rôle moins chantant et effeminé que d’habitude.

Percus : un pièce contemporaine d’Éric Tanguy (que j’ai pas mal fréquenté passé un temps).

Trombone : alors là, je vous conseille grandement le début de ce morceau du tromboniste de Jazz Slide Hampton, qui est un de mes morceaux préférés.

Violoncelle : Le must absolu est bien sûr le concerto de Chostakovitch.

C’est une musique assez perturbante, mais prenez un moment pour vous laisser convaincre. Sinon, vous pouvez bien sûr vous rabattre sur l’Élégie de Fauré qui aura peu de chances de vous traumatiser. Le premier morceau montrait le côté brutal du violoncelle, le second montre son côté chantant.


Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. La suite plus tard et ci-dessous dans les commentaires.


Mise à jour, deux ans plus tard... Finalement nous n’avons guère avancé, en partie par manque de disponibilité de ma part... Cependant je me suis servi des esquisses réalisées à cette occasion pour ma petite pièce intitulée Danse Kàla, et je garde un très bon souvenir de ce projet. même s’il n’a pas été aussi loin qu’il le mériterait.

En tout cas, un grand merci à Camille, Cécila, Raphaël et Clément ; bon courage à vous quatre pour la suite de vos études !

Messages

  • Très curieuse de voir ce que vous allez concocter là... Bon courage a tous !

    • C’est super ce que tu as commencé ! Je me dis que ce serait bien que tous les membres du groupe viennent régulièrement sur ce site afin que nous avançons ensemble... Concernant la différence d’intensité entre les instruments, peut-être qu’il faudrait que chaque instrument ait une partie « solo » à un moment pour pouvoir les entendre plus particulièrement ; et ces « solos » pourraient être très différents afin de créer un contraste musical ? c’est juste une idée comme ça...

    • Salut Camille,

      Effectivement, c’était ça l’idée : que mon humble site web puisse accueillir les discussions.

      Alors pour ce qui est des « solos », c’est une bonne idée. Les contrastes, c’est très bien mais il faut aussi faire attention à la cohérence du morceau (ou alors on écrit quatre morceaux différents, mais tout le challenge disparaît :) ).

      Il est certain que chaque instrument devra être mis en valeur par une idée musicale ; la question de savoir s’il vaut mieux que cette idée soit jouée toute seule ou si les autres peuvent « l’accompagner », il est trop tôt pour le dire.

      Bon, si les autres passent dans le coin, il faudra aussi qu’on réponde aux questions que j’ai soulevées (nature des instruments du percussionniste, note aigüe maximum qu’on peut demander au violoncelliste, etc).

    • Bonjour Valentin ton article est super ! tu a fait une magnifique présentation du violoncelle.En effet il a une très grande tessiture et peut avoir des mélodies très chantées ou très rythmique en si qui concerne « les notes aigus » il n’y pas de soucis je suis capable de pouvoir suivre.Les quatres morceaux différents peut etre intéressant mais je vais voir avec les autres se qui en pense... Raphael

    • Contrairement à Raphaël, l’idée de 4 morceaux ne me plait pas. Ce qui est intéressant c’est justement de travailler sur les différences d’instruments et donc comment les assembler. A nous de voir comment faire...

    • bonjour a tous ! Valentin, bravo et merci pour ce site qui est une réussite ! Tu t’es vraiment bien appliqué pour décrire chaque instrument, et je suis d’accord avec toi les percussionnistes ne sont pas forcément des brutes ! Alors pour répondre a ta question, il y aura toujours moyen de ramener un marimba ou un vibra. Des timbales seront plus durent a ramener ! J’ai tout particulièrement une attirance pour le marimba donc je trouverai si il en faut un !!! Pour moi l’idée des 4 pièces différentes me gêne car comme tu le dis ça serai renoncer au challenge...

    • Je voulais savoir votre avis et si sa marche toujours a fond pour ce quatuor Tout le monde semble bien daccord pour un ensemble je suis bien évidement a fond pour ce projet.Nous avions pensé mettre notre caractère ou nos gouts musicales a travers notre partie instrumentale...?

  • Bonjour tout le monde,

    je vais essayer de reprendre un peu tout ce qui a été dit, pour faire le point et avancer.

    Tout d’abord, je pense que ce serait dommage de faire quatre morceaux différents. Essayons d’en faire un seul, mais qui soit cohérent ; c’est déjà difficile. Pour l’idée de mettre chacun vos goûts et votre personnalité dans vos parties musicales, je crois que c’est plutôt la personnalité de chaque instrument qui est importante, comme je l’ai décrit dans l’article ci-dessus. Ensuite, eh bien à vous de vous exprimer chacun à votre façon de par votre manière de jouer : c’est cela l’interprétation :-)

    Raphaël a utilisé le mot « quatuor », et ça ne m’était même pas venu à l’idée (en général on emploie ce terme pour désigner des instruments plus proches les uns des autres), mais c’est un bon point de départ.

    Clément : OK pour le marimba, tu peux commencer à en chercher un.

    La personne qui n’a pas signé son commentaire (Cécilia ?) : la prochaine fois, penses-y — c’est plus pratique pour s’y retrouver...


    Bon, je vous propose maintenant de commencer à réfléchir à la structure et au caractère de la pièce.

    Un procédé archi-classique et très efficace est de penser en trois parties A - B - A, dont la dernière est une reprise de la première :
    Exposition - Développement - Ré-exposition
    C’est une forme qui est très cohérente, et qui permet pas mal de contraste entre la partie A et la partie B. Par exemple, le début peut être assez rapide et brillant, puis la partie centrale plus lente, plus fouillée, et enfin on relance la machine et on finit très brillamment pour donner envie aux gens d’applaudir.

    Cependant, étant donné notre instrumentation un peu bizarre, je ne suis pas sûr que ça soit une bonne idée de commencer cash par un truc très rapide. Je verrais bien une introduction lente, pour donner aux auditeurs le temps d’identifier les instruments, de s’habituer à cette formation.

    On peut, par exemple, faire entrer les instruments un par un, progressivement, chacun jouant une boucle (c’est le procédé utilisé en techno ou dans la plupart des chansons enregistrées en studio).
    Je pense par exemple à ce qu’on appelle la musique répétitive (eh oui, ça s’appelle comme ça), dont voici un exemple cultissime du compositeur Steve Reich (voir aussi cette vidéo sur YouTube, et tout ce que vous trouverez dans « vidéos similaires »). Ce n’est qu’un exemple, hein.

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